A la frontière entre la commémoration et le voyeurisme, il existe une nouvelle forme de tourisme qui commence à faire de nombreux adeptes à travers le monde. Focus sur le tourisme "noir" ou quand les sites liés à la mort deviennent des excursions touristiques...
Qu'est-ce que le "Dark Tourism" ?
Dans le jargon, on le nomme "Dark Tourism" ou "tourisme noir". Mais vous avez pu également lire dans certains cas, l'expression "tourisme macabre". Ici on est loin des excursions traditionnelles comme la découverte du Colisée à Rome ou la Pyramide du Louvre à Paris. Mais plutôt dans
la visite de lieux où se sont produits des tragédies, des drames de l'Histoire, des catastrophes naturelles ou même des meurtres. Une catégorie de gens est fascinée par ces endroits, à tel point que des circuits touristiques se sont créés pour suivre cet engouement.
A
Tchernobyl par exemple, on peut visiter la ville détruite par la catastrophe nucléaire survenue dans les années 80, alors qu'il existe encore un risque de radioactivité.
Pour autant, on pourrait penser que le tourisme noir se rapproche du
tourisme de mémoire, qui consiste à se rendre dans des endroits commémoratifs comme le cimetière américain en Normandie ou les tranchées de Verdun dans l'Est de la France. Or on trouve dans le dark tourisme ce côté voyeurisme qui dérange, autour de ces lieux symbolisés par la mort, dans lesquels certains y trouvent une forme d'excitation.
ville fantome de pripiat près de tchernobyl
© alessandro lucca / 123RF
Ces sites tristement célèbres
- le camp de concentration d’Auschwitz
Depuis quelques années le camp situé en Pologne est ouvert au public où des visites guidées sont proposées. Certains y voient l'occasion de marquer la mémoire des milliers de juifs déportés pendant la Seconde Guerre Mondiale, d'autres y voit une exploitation du malheur au profit des tours opérateurs.
- la prison d'Alcatraz
Partir du Golden Gate au volant d'une
voiture de location à San Francisco c'est incontournable. Mais visiter la prison d'Alcatraz c'est tendance. Ils sont plus d'1 million chaque année à marcher sur les pas d'anciens prisonniers qui ont purgé leur peine sur ce rocher célèbre, avant sa fermeture en 1963. Entrer dans la cellule d'Al Capone, certains trouvent ça glauque, d'autres excitant...
- Ground Zero
Tous les
guides pour New York incluent désormais la visite de Ground Zero, ce mémorial dédié aux victimes des attentats du 11 septembre 2001, où les deux tours du World Trade Center ont été détruites. On y trouve un musée où sont exposées des reliques - un camion de pompier, des débris des tours jumelles - mais aussi le "wall of faces" un mur où sont affichées les photos des victimes. Curiosité malsaine ou devoir de mémoire ?
- Fukushima / Tchernobyl
En 1986 avait lieu la plus grande catastrophe nucléaire d'Europe à la centrale de Tchernobyl. En 2011 ce fût l'explosion de la centrale de Fukushima qui sema la panique au Japon. Depuis, on y organise des visites guidées, équipés de compteurs Geiger et on prend des selfies dans ces deux villes fantômes. Quand la folie se marie à la stupidité...
- Dallas, sur les pas de l'assassinat de Kennedy
L'un des endroits les plus touristiques du Texas c'est Dallas. Non pas pour son musée des Beaux Arts, encore moins pour son jardin botanique, mais parce que c'est ici que l'ancien président des Etats-Unis JF Kennedy fût assassiné en 1963. Devant la place du Dealy Plaza, une croix blanche marque l’emplacement exact où le président mourut d'une balle dans la tête à l'arrière de sa limousine. Une excursion y est organisée, suivant l'itinéraire exact de la voiture présidentielle. Dans le musée, il y a une reconstitution de la pièce depuis laquelle l'assassin aurait tiré. Cette visite fait fureur auprès des Américains, férus d'histoires tragiques.
- Les favelas de Rio de Janeiro, les bidonvilles de Soweto...
…ou encore les quartiers touchés par Katrina à la Nouvelle Orléans... Ces endroits d'une pauvreté extrême ou dévastés par des catastrophes naturelles, font l'objet de « tours » organisés par des agences spécialisées, dont certaines reversent une partie des bénéficies engendrés aux désœuvrés. Difficile de voir la frontière entre spectateurs de la misère ou véritables personnes soucieuses de l'aide humanitaire.